Les galères gênoises au service des Croisés (1104)
La prise de Jbail (Gibelet pour les Croisés, aujourd'hui Byblos) fut une spectaculaire opération maritime menée au tout début du XIIème siècle. Lors de la première croisade en 1099, les Croisés passèrent au voisinage de Jbeil mais ne l'attaquèrent pas, en vertu d'un accord de non-agression passé avec le gouverneur de Tripoli, Ibn 'Ammar.
Français 68, fol. 359, Saladin incendiant une cité
En 1103, une escadre génoise de 40 galères hiverna à Laodicée (Lattaquié) . Raymond de Saint-Gilles comprit qu'il avait là une flotte capable de partir à la conquête des ports libanais. Raymond alla à la rencontre des Génois qui acceptèrent son offre. Ils tentèrent ensemble de prendre possession de la presqu'île de Tripoli (fin de l'été 1103). Ce fut un échec, provisoirement en tous cas.
la baie de Jbeil (Byblos, photo C.Bélingard, août 2010)
Le nouvel objectif des alliés fut de s'emparer de Jbail, l'ancienne Byblos, bientôt appelée par les croisés Gibelet. C'était une petite place maritime située entre Tripoli et Beyrouth et qui dépendait, elle aussi, des Banû 'Ammâr. La cité fut prise en tenaille entre l'escadre génoise venant du côté de la mer, et les assauts de l'armée de Raymond de Saint-Gilles par voie terrestre, qui utilisa des catapultes. Gibelet capitula vers le 28 avril 1104. (1)
Selon un chroniqueur musulman, Ibn al-Athîr, les Francs s'emparèrent des biens des habitants, mais il n'y eut pas de massacre. Raymond récompensa les Génois en leur accordant un tiers de Gibelet. Ce premier comptoir fut aussitôt organisé sous le commandement d'un consul génois, Ansaldo Corso. Gibelet devint une véritable colonie génoise sous la direction de la famille des Embriaci.
les vestiges actuels de la citadelle de Jbeil (photo C.Bélingard, août 2011)
La ville fut finalement reprise en août 1187 par Saladin. Suite à l'emprisonnement d'Hugues III d'Embriac lors de la bataille de Hattin, le propriétaire l'échangea contre la liberté de son seigneur. Terrorisé par l'arrivée de Frédéric Barberousse aux confins de la Syrie, le sultan fit démanteler la ville et son château. Une décennie plus tard, la famille Embriac recouvra son fief grâce à l'habilité diplomatique de la douairière Etiennette de Milly, veuve d'Hughes III, qui réussit à corrompre le gouverneur musulman de la ville et à la réoccuper pacifiquement. Contrairement aux lambeaux du comté de Tripoli qui furent évacués après la prise de sa capitale par le sultan Qalaoun, il semblerait que Pierre, dernier chef de la très souple famille Embriac,i ait obtenu un sursis du sultan pour évacuer la place (2)
Sources:
(1)René Grousset - Histoire des Croisades et du Royaume Franc de Jérusalem - Plon - Paris – 1934
(2) Maxime Goepp, Forteresses d'Orient, 2009
localiser Jbeil (Gibelet, Byblos)