Quand les templiers tiraient parti de la forêt du Limousin : l'exemple de Puy Bonnieux
La commanderie templière de Puy Bonnieux ( située aujourd'hui sur la commune de Pageas en Haute-Vienne) a pu être localisée à proximité d'un des itinéraires de Saint-Jacques-de-Compostelle qui traversait la région limousine. Cela justifierait le choix de l'ordre pour s'implanter dans ce secteur géographique. Mais il faut sûrement tenir compte également des atouts agricoles et forestiers offerts par le terroir local.
Une carte ancienne, dite carte de Fayen, établie en 1594 montre que la forêt occupait en effet une place importante dans l'espace géographique qui entourait la commanderie. Une autre source le précise d'ailleurs clairement. Il s'agit des procès-verbaux des visites prieurales de 1615-1617, à partir desquels le chartiste Augustin Vayssière1 a écrit un ouvrage de référence sur le sujet. Il est précisé que, parmi les biens dont disposaient les membres de la commanderie de Puy Bonnieux, « les forêts de haute futaie appelées la Pluie, le Bois-Gros et la grande forêt de la commanderie » devaient être spécialement mentionnées car étant « considérables ». Les procès-verbaux précisent encore que « les habitants dudit village de Puybonnieu y ont droit d'usage pour mener paistre leurs pourceaux, lors de la saison de la glande ».
Il suffit de parcourir aujourd'hui encore le pays pour se rendre compte que la forêt reste une ressource locale importante. A l'époque médiévale, la commanderie de Puy Bonnieux pouvait également compter sur les ressources céréalières de la région. Le Moulin du Temple sur la Gorre a aujourd'hui disparu mais il reste mentionné par exemple sur le cadastre napoléonien. Vayssière indique que ce moulin banal était à l'usage des habitants de Chenevières, des villages de Puybonnieux , de Sainte-Catherine, des Fossés, de la Jourdaigne, de la Rivière, de Curmont, de Groulier, de Masardi, de Dompney, de la Peytavigne et du Verdier. Les paysans de ces hameaux étaient tenus d'y moudre leurs grains. Le moulin du Temple rapportait jusqu'à « soixante setiers de seigle. »
La commanderie de Puy Bonnieux possédait un château dont il ne reste rien, avec une chapelle. On entrait dans cette place forte gardée par une tour carrée au moyen d'un « portail de pierre de taille rond, au dessus duquel il y avait cinq meurtrières et babacannes ». A l'abolition de l'ordre par Philippe le Bel, tous les biens de cette commanderie furent réunis à ceux de Chenevières, le hameau voisin où était implanté l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Ce modeste bourg conserve encore son église, pillée et en partie ruinée pendant les guerres de Religion. Placée sous le vocable de Saint-Jean Baptiste, l'édifice présente la particularité d'être un ensemble massif du XIème siècle, avec seulement deux ouvertures.
sources:
Augustin Vayssière, l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem ou de Malte en Limousin et dans l'ancien diocèse de Limoges, Tulle, 1884
Roger et Marie-Antoinette Boudrie, Eglises rurales en Bandiat-Tardoire, Panazol, 1994